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L’UNION with Jean-Charles Della Faille à propos du Storytelling

By: Camille Differdange - 03 avril 2018 - 1

Jean-Charles Della Faille, spécialiste du WHY et du storytelling nous raconte au travers de quelques questions l’importance de connaitre le WHY de son entreprise ou de sa marque, c’est-à-dire les valeurs qui motiveront les actes et choix qui seront pris, et pourquoi il est nécessaire de l’appliquer à tous les niveaux se son activité professionnelle. 

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ? 

Mon nom est Jean-Charles Della Faille. J’ai travaillé pendant 20 ans dans la publicité et depuis 5 ans, j’accompagne les entreprises pour les aider à se raconter, à mieux se raconter et à être inspirantes.

Qu’est-ce que le storytelling ?

J’ai d’abord envie de répondre, qu’est-ce que n’est pas le storytelling ? Pendant des années, les gens ont cru que le storytelling, c’était un enfumage, c’est-à-dire qu’on va raconter une belle histoire pour masquer une réalité qui n’est pas si rose. Aujourd’hui, dans le monde des réseaux sociaux, on ne peut plus faire ça. Même si on a bien vu la force des fake news, aujourd’hui il n’y a rien de plus puissant que la vérité.

Donc d’abord le storytelling, c’est de la vérité. Ensuite, on pense aussi que le storytelling ce sont des mots, en réalité ce sont surtout des actes que l’on va poser, des actes qui vont raconter ce que l’on fait. Donc, au lieu juste de raconter une belle histoire, il faut poser des actes et raconter cette histoire.

Si vous regardez un film de cowboys par exemple, l’histoire ce sont les actes qu’ils posent : le cowboy arrive sur son cheval dans le village, il descend de son cheval, il tue le sheriff, il rentre dans le saloon, il prend une fille, il l’amène avec lui, ils vont dans les montagnes.

C’est la même chose pour les entreprises: elles doivent avoir une direction claire et précise et poser des actes clairs et précis qui vont dans cette direction, actes qu’elles raconteront tout au long de l’année.

Nous avons remarqué un nouvel engouement pour le storytelling depuis quelques années, qu’y a-t-il de nouveau ?

Je pense que les gens ont envie de se différencier, d’une certaine manière. Les gens ont aussi envie de se raconter une histoire à eux-mêmes, d’être inspirés le matin en allant travailler. Quelque part, le storytelling, c’est déjà une histoire qu’on se raconte à soi-même. C’est de dire: « qu’est-ce que je fais, à quoi sert ma vie, comment je lui donne du sens ? ». C’est pour ça que moi, j’estime que le storytelling c’est avant tout s’aligner à ses valeurs.

Si une entreprise est bien consciente de toutes ses valeurs, elle va agir en concordance avec celles-ci. Par exemple, si la bienveillance est une valeur importante pour moi, je serais extrêmement bienveillant avec les gens en interne,  avec les fournisseurs, avec tout le monde. Mais je vais surtout essayer d’avoir des relations bienveillantes avec les autres (par exemple, avec des partenaires de boulot, avec les clients, etc.). Donc la bienveillance sera à tous les niveaux. C’est là où, à un moment, on fait des choses concrètes plutôt que de l’abstrait.

Quel est le lien entre le WHY et le Storytelling ?

Le WHY… Ce qui m’a fasciné dans ce modèle que j’ai découvert il y a 5 ans, c’est qu’il explique de manière extrêmement simple comment construire une entreprise, comment avoir une vision à long terme d’une entreprise et comment raconter cette entreprise. C’est-à-dire que quand on sait pourquoi on fait les choses, on sait beaucoup mieux comment le raconter.

Par exemple, le WHY de Nike c’est le dépassement de soi. Ils le racontent dans la publicité, mais aussi dans leurs produits, dans leurs magasins, dans les vedettes qu’ils sponsorisent, etc. Ce dépassement de soi transpire à tous les niveaux de l’entreprise. C’est là où ce n’est plus juste du pipeau, du blabla, ce sont des choses concrètes. Si vous prenez les Nike Air qui sont sorties il y a trente ans : c’était la première fois qu’on mettait de l’air dans des semelles de chaussure et quand vous courrez avec pour la première fois, vous avez effectivement l’impression d’être plus puissant, d’être plus performant. En fait, vous avez l’impression de plus facilement vous dépasser.

Donc, ce WHY, si on le comprend bien et qu’on décide de l’implémenter à tous les niveaux de l’entreprise, c’est ce qui va raconter votre entreprise.

En quoi définir un WHY est-il important ?

Un WHY sert à mettre tout le monde d’accord (toutes les parties prenantes dans l’entreprise). Quand vous avez des associés, quand vous avez des employés, parfois les gens ne savent plus très bien pourquoi ils se lèvent le matin et quelle direction il faut donner.

C’est en fait le rapport du WHY et du HOW (ce que vous faites concrètement) qui est important. Par exemple, le HOW de Nike, c’est la technologie et l’innovation au service du dépassement de soi. Il y a donc des produits sportifs, mais ils ont aussi, par exemple, une application qui s’appelle « Nike Run » avec laquelle les gens peuvent aller courir, où l’on retrouve la technologie et de l’innovation au service du dépassement de soi.

Quand on a un WHY clair, toute l’entreprise sait où elle va. Et non seulement toute l’entreprise sait où elle va, mais les clients savent pourquoi ils viennent.

Le WHY, c’est de l’émotionnel pur. L’émotionnel est traité dans le cerveau par le système limbique, qui n’est pas le cerveau du langage, donc on parfois du mal à mettre des mots là-dessus. Pendant des années, j’ai utilisé des Nike sans me dire « tiens, je suis dans le dépassement de soi », je n’y mettais pas de mot.

Est-ce un concept transposable hors des grandes marques B2C ?

J’ai travaillé pour du B2C, pour des très grandes marques B2C pendant 20 ans. Aujourd’hui, je travaille pour des petites marques B2C, B2B (beaucoup de B2B), pour des organisations, pour des ONG, pour toutes sortes de choses. Cela fonctionne pour absolument tout le monde, c’est ça qui est intéressant. On ne doit pas être une grande marque et avoir beaucoup d’argent pour communiquer de manière intelligente et juste. En revanche, pour émettre son message, là on aura besoin d’évidemment plus d’argent ; plus on a d’argent plus le message va se répandre. Mais il y a des marques qui communiquent très peu et qui ont un WHY très fort que l’on perçoit bien et donc qui ont de vrais fans. Il est intéressant de comprendre ce qu’elles ont fait pour en arriver là. En fait, elles sont justes; tout ce qu’elles font est calqué sur leur WHY : chaque produit, action, la manière d’accueillir leurs clients, la façon dans elles font leur site internet. Tout est juste par rapport à ce WHY.

Quelles sont les caractéristiques d’un bon WHY ?

Il doit être simple, il doit être vrai, il doit être déclinable à tous les niveaux. Un bon WHY c’est une motivation universelle. Vous prenez Nike, elle nourrit le dépassement de soi. Vous prenez Harley Davidson, elle nourrit le besoin de liberté. Si vous parvenez à définir la mission/le WHY de votre entreprise par une motivation universelle simple, tout le monde sait dans quelle direction il va.

Il doit être simple, court, juste et vrai !

 

Y a-t-il une influence du digital sur le storytelling ?

Oui, bien sur. La chose que je vois souvent sur les pages Facebook des marques, c’est qu’elles parlent d’elles-mêmes, de leurs produits. Si on voit les trois cercles de Simon Sinek, le WHY, le HOW et le WHAT, elles parlent du WHAT, de ce qu’elles font.

Mais les gens ne suivent pas une page pour connaitre les nouveaux produits, c’est un peu gonflant. Sur Facebook, on devrait beaucoup plus parler du WHY. Cela ne veut pas dire qu’il ne faut jamais parler du WHAT, mais qu’il faut beaucoup plus parler du WHY. A un moment, il faut vraiment créer une communauté de vrais fans, pas juste des gens qui vous suivent par politesse. L’intérêt d’une motivation universelle, c’est que ça touche tout le monde.

Je donne beaucoup de conférences et parfois je demande aux gens: « levez la main si vous ne vous dépassez jamais ». Personne ne lève la main évidemment. Si ces motivations sont universelles, ce n’est pas pour rien. Ça ne veut pas dire que tout le monde est dans le dépassement de soi, mais personne n’a envie de dire qu’il est contre ça. Qui est contre la liberté ? Personne, a priori.

Quelle sont les erreurs à ne pas commettre ?

Se focaliser sur le WHAT. Les marques qui meurent sont souvent des marques qui ne changent pas leurs produits…

Disons que quand on a un WHY bien clair, il ne faut pas le changer. Un WHY ce n’est pas une mode. Le dépassement de soi, c’est quelque chose qui parle aujourd’hui aux humains, qui parlait déjà il y a mille ans et qui parlera dans mille ans aux humains.

Donc une faute à ne pas commettre c’est d’en changer, croire que c’est une mode, croire que c’est une tendance alors que ça ne l’est pas du tout. C’est quelque chose de beaucoup plus profond. Après, la couleur et la manière dont on va raconter va peut-être un peu changer en fonction des tendances, mais le fond doit rester le même.

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Comments

Laurent Samain

Excellent ! Il aide énormément dans la définition d'un axe de travail !

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